Le match France-Japon passe au crible

A quelques jours du match France-Japon un spécialiste du Rugby Japonais, @AkimotoHinato (rédacteur http://japonrugby.net et http://asierugby.net ) décrypte pour nous cette belle rencontre qui s’annonce à la U Arena le 25 Novembre prochain. Le dernier match de la tournée de Novembre pour le XV de France est un rendez-vous attendu. En plus, d’être un enjeu important pour les hommes de Guy Novès face à l’organisateur de la Coupe du Monde 2019, cette rencontre sera le premier match de Rugby à la U Arena un rendez-vous spectaculaire à ne pas manquer.

Le 25 Novembre la U Arena va accueillir le dernier match de la tournée de Novembre France – Japon, un bon test pour les deux équipes. A quel match peut-on s’attendre ?

@AkimotoHinato : On peut s’attendre à un match entre deux équipes en plein doute et qui ont toutes les deux une infirmerie pleine. La France sortira d’un marathon face à la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du sud et y aura sans doute laissé des traces tandis que le Japon arrivera avec notamment aucun vrai deuxième ligne dans son effectif. Les Kazuki Himeno, Wimpie van der valt et Uwe Helu sont des troisièmes lignes de métier. C’est certainement la seule sélection qui est dans cette situation pour ces tests matchs de novembre.

Quels sont les joueurs à suivre côté Japonais ?

@AkimotoHinato : Côté japonais, les joueurs à suivre en priorité seront bien évidemment les troisièmes lignes Michael Leitch (capitaine) et Amanaki Lelei Mafi (meilleur joueur des franchises australiennes du Super Rugby 2017), l’ailier très rapide Kenki Fukuoka (meilleur joueur nippon cette année), l’arrière Kotaro Matsushima, le jeune Rikiya Matsuda (grand espoir et joueur très polyvalent pouvant évoluer 10, 12 et 15), mais aussi devant les cadres que sont le pilier gauche Keita Inagaki et le talonneur Shota Horie.

Mais la petite pépite à découvrir que personne ne connait chez nous, c’est Kazuki Himeno. Ce jeune 3ème ligne (23 ans, 187 cm, 108 kg) explose pour sa première saison en Top League avec Toyota Verblitz (entraîné par Jake White) et dont il est le capitaine. Un joueur dont on connait son talent depuis ses quatre années chez Teikyo University et qui a franchis un pas le 4 novembre dernier lors de la défaite du Japon contre l’Australie (30 à 63). Pour sa première cape, Kazuki Himeno (positionné en 2ème ligne en raison de ce poste décimé) a livré un match énorme (le meilleur japonais ce jour-là). Une facilité à franchir les défenses adverses, gros plaqueur et un incroyable gratteur de ballons. Une performance qui a impressionné les spectateurs et commentateurs nippons, le sélectionneur Jamie Joseph ainsi que les médias australiens.

Pouvez-vous nous décrire le jeu des Japonais ? Quel est leur projet de jeu ?

@AkimotoHinato : Le jeu des japonais a changé depuis Eddie Jones. Lors de la coupe du monde de rugby 2015, celui-ci se basait avant tout sur une conquête très solide (Dal Maso à la mêlée) et une importante possession de balle avec de très longues séquences de jeu. Depuis que Jamie Joseph a pris la tête des Brave Blossoms en 2016, le technicien néo-zélandais a donné pour consigne notamment un jeu au pied bien plus fréquent que dans le passé qui n’est vraiment pas dans la nature du jeu nippon historiquement. Renvoyer le ballon très vite dans le camp adverse, laisser la possession à l’adversaire et se baser sur une solide défense. Sauf que ce dernier point est le gros point faible de cette équipe. Aussi Jamie Joseph a renvoyé Ben Herring et a fait rejoindre dans son staff son compatriote John Plumtree (entraîneur-adjoint des Hurricanes). On a pu voir contre la sélection World XV et l’Australie la volonté de mettre en place une défense plus agressive mais évidemment c’est encore loin d’être parfait. Il y a encore du chantier dans ce secteur d’ici 2019.

Avec l’approche de la Coupe du Monde 2019, les Japonais sont-ils en train de monter une équipe pour préparer cette grande compétition ?

@AkimotoHinato : C’est la volonté en tout cas. La réalité est plus dure. Tout d’abord car la JRFU a mis du temps pour trouver le sélectionneur d’Eddie Jones. Mark Hammet (entraîneur des Sunwolves en 2016) a ainsi servi de sélectionneur intérimaire lors des deux tests matchs de juin 2016 face à l’Ecosse. Le vrai chantier de la sélection n’a débuté qu’en octobre/novembre 2016 avec la prise de fonction de Jamie Joseph. Nous sommes rentrés dans un nouveau cycle, beaucoup de nouveaux joueurs, un nouveau style de jeu voulu. Lors du test match perdu face à l’Australie (63 à 30), il ne restait que huit joueurs (sur les 23 de la feuille de match) de la coupe du monde de rugby de 2015 en Angleterre. C’est donc une équipe des Brave Blossoms en construction que nous suivons ces derniers temps. On ne pourra la juger réellement que lors du mondial de 2019.

Que peut-on attendre de l’équipe Japonaise pour cette tournée de Novembre ?

@AkimotoHinato :  Comme je l’ai dit plutôt, les Brave Blossoms sont en pleine reconstruction et arrivent avec aucun deuxième ligne dans leur effectif. C’est une équipe en total chantier dont on essayera au mieux de constater les quelques progrès. Cette tournée servira surtout avant tout à Jamie Joseph pour tester les nouveaux joueurs et faire un peu plus le tri à deux ans du mondial au pays.

Ce sport est en expansion au Japon avec le sevens et la Coupe du Monde, quelles sont les caractéristiques du Rugby Nipon ?

@AkimotoHinato : Pour commencer, le rugby nippon est l’un des plus anciens au monde. Son plus vieux club (Yokohama Country & Athletic Club) a été fondé en 1866 par la colonie britannique de la ville. Le rugby a une forte tradition scolaire avec ses clubs universitaires (dont les plus célèbres Keio University, Waseda University, Meiji University, Teikyo University) et avec son traditionnel et mythique tournoi national lycéen qui se déroule chaque fin d’année dans « La Mecque » du rugby nippon, le mythique Hanazono Stadium d’Higashi-Osaka, qui sera l’un des stades de la coupe du monde de rugby de 2019. Le rugby japonais a aussi une longue histoire avec ses clubs corpos qui se sont multipliés après la seconde guerre-mondiale. Les plus célèbres étant Yawata Steel, Kintetsu Liners, Toyota Verblitz, Kobelco Steelers et Nippon Steel Kamaishi avant la domination ces dernières années des Toshiba Brave Lupus, Suntory Sungoliath et Panasonic Wild Knights.

La dernière confrontation face au Japon était en 2011 (47-21), depuis cette rencontre comment à évoluer l’équipe japonaise ?

@AkimotoHinato :  L’équipe a gagné en expérience de matchs de haut niveau (Ecosse, Irlande, Italie, Pays de Galles, Australie, etc…). Les meilleurs internationaux japonais sont partis dans les championnats étrangers, les précurseurs étant Fumiaki Tanaka et Shota Horie participant à l’ITM Cup avec Otago en 2012, alors entraîné par Tony Brown (leur ancien coéquipier chez les Wild Knights) avant de devenir les tout premiers joueurs nippons de l’histoire à jouer en Super Rugby en 2013. Les cas se sont multipliés dans les années qui ont suivi, avec leur succès et leurs échecs avant l’arrivée des Sunwolves en 2016. Aujourd’hui, la grande majorité des internationaux japonais évoluent en Super Rugby, ce qui est une très grande différence avec le dernier match contre la France lors de la coupe du monde de rugby de 2011.

Quel est votre pronostic pour ce match et pourquoi ?

@AkimotoHinato :  Victoire pour celui qui arrivera avec le moins de casse dans son effectif. Les japonais n’ont pas de deuxième ligne. Si d’ici là les Brave Blossoms perdent d’autres cadres majeurs, ce sera mission impossible. N’oublions pas que le Japon est une nation tier 2 contrairement à la France et n’a pas la même profondeur de banc.

On connait maintenant la poule et le calendrier de la Coupe du Monde 2019, la Japon est dans une poule « abordable ». L’impatience monte dans le monde du Rugby Japonais.On connait maintenant la poule et le calendrier de la Coupe du Monde 2019, la Japon est dans une poule « abordable ». L’impatience monte dans le monde du Rugby Japonais ? Quels sont leurs attentes ?

@AkimotoHinato :  Le rugby est loin d’être le sport numéro un au Japon mais il a une longue histoire et y a sa place. Le mondial 2019 ne sera pas suivi par tous les japonais, loin de là. Mais il pourrait grandir selon les résultats. En ce qui concerne le monde du rugby nippon, l’impatience est évidemment présente. Les attentes sont clairement d’atteindre pour la première fois de l’histoire les 1/4 de finales d’une coupe du monde de rugby. Maintenant, les Brave Blossoms le feront-ils? Si je devais dire à l’heure actuelle en fonction des performances, la réponse serait évidemment non. Mais n’oublions l’état du Japon d’Eddie Jones en 2013 qui étaient à des années lumières de celui de 2015. Il reste deux ans à Jamie Joseph pour bâtir une équipe nippone prête pour le mondial 2019 et deux Super Rugby entre-temps qui plus est, puisque le technicien néo-zélandais dirigera aussi les Sunwolves désormais et aura ses internationaux sous ses ordres quasiment toute l’année. C’est un plus énorme.

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